Ah, juin est là !
En mai, le Spoutnik a été magnifiquement déserté.
Et Cannes, tragiquement envahi. Là-bas, on y voit le cinéma comme une ascension - la montée des marches - mais on ne voit jamais ce beau monde redescendre.
À Marseille, un peu plus tôt dans l’année, a eu lieu au Polygone Étoilé la semaine asymétrique, une rencontre de cinéastes en public, partageant leurs films et leurs recherches. Là-bas, il y a aussi des escaliers mais tout y est plutôt horizontal. Pas de compétition, pas de billetterie, des horaires approximatifs, une cantine prix libre et de longs temps de discussion. Les cinéastes cuisinent. Les cinéastes mangent à la même table que des personnes de passage ou les habitant.e.s du quartier. Tous les films y ont le même statut: Tonino du haut de ses quatre vingt quatre ans et des ses milliers de films voisine avec des enfants qui montrent leurs premières bricoles.
Là-bas, il n’y a que des chefs-d'œuvre ou il n’y en a pas.
Être mêlé à tout cela, ça nous a fait chaud au cœur.
Pour notre retour, les ami.e.s du Polygone nous ont déposé des bobines 35 mm dans le coffre. Ce sont celles de Flacky et camarades - le cheval de fer. Histoire de rencontres encore, entre des apprentis cinéastes et des mineurs dans les années soixante-dix. Projection prévue le 12 juin !
Toujours en provenance du réseau du Polygone, Nathalie et Nicola viendront nous raconter comment ils ont fabriqué des films avec des gosses. Films naïfs, spontanés, directs. Ça aussi, ça fait du bien. Ce soir-là, le 15 juin, il y aura Maybe Alan, Andrea et d’autres enfants peut-être pour un concert. On aimerait que tout le monde soit payé.
Puis, il y a Fabrice Aragno, le producteur du gars de Rolle (Jean-Luc donc) qui nous a appelé pour projeter Le livre d’image. On a dit oui. Occasion aussi de revoir certains de ses courts-métrages. Et là, émerveillement. Dans l’un deux, Godard nous dit: « Il sera donc de la règle de l'Europe de la culture d'organiser la mort de l'art de vivre qui fleurit encore à nos pieds. ». Ça fait réfléchir. Pas sûr qu’à Cannes, ils aient entendu ça. Ce sera du 1er au 6 juin.
Rolle, hors-capitale du cinéma ! Imaginez-vous. Le 6 juin, en pleine canicule, vous pourrez voir six films de Jean-Luc et un de la paire Huillet-Straub. Et pas n’importe lequel. Chronique d’Anna Magdalena Bach. Oui, en 1967, ils ont fait le choix de la vie et de la lutte de Bach plutôt que celles des toto de la Sorbonne.
Puisqu’on aime toujours faire des rencontres, on va retourner dehors. Deux soirs, les 7 (buvette de l’Écurie) et 14 (à Malagnou) juin, pour fêter les cinquante ans du Collectif Jeune Cinéma. Le CJC, c’est une coopérative qui se bat pour préserver, diffuser les pratiques de cinéma expérimental et différent. Parmi leur immense inventaire de films, on a fait le choix de quatre d’objets qui se tiennent proches de celles et ceux qui résistent. Les habitants du quartier d'Exarchia à Athènes, le peuple Kabyle, les amérindiens, les afroaméricains…
Enfin, il y a la petite sortie du mois. Enfin, pas si petite. C’est Le grand mouvement de Kiro Russo. Dans la ville de La Paz, immense fourmilière, de loin infernale, le film accompagne les errances de quelques personnages. Sur leurs chemins, de belles visions, notamment ces femmes - l’air de rien, l’air de reines - allongées sur des tas d’oignons. 1, 2, 3, 4, 5, 8, 9, 10 et 11 juin.
Nous sommes peuplés de désirs.
Et vous ?