USKI ROTI de Mani Kaul


jeu. 16 mars 2023   20h30
mar. 28 mars 2023   20h30
Cycle

LA POÉSIE, LA MAISON, LE MONDE, ET LE CINÉMA les films de Mani Kaul et Govindan Aravindan

USKI ROTI (NOTRE PAIN QUOTIDIEN), Mani Kaul, Inde, 1969, 110’, Vo, sous-titré français

Dans Uski Roti, une jeune épouse traverse chaque jour les sentiers de campagne du Pendjab pour attendre son mari, chauffeur, à l’arrêt de bus et lui donner le pain qu’elle a patiemment pétri à cet effet. Mais l’homme la néglige, préférant boire, jouer aux cartes et entretenir une maîtresse que rentrer au bercail. L’expectative est donc l’objet de ce film à l’empreinte documentaire, imprégné du quotidien villageois, mais au déroulement inédit, car arrimé à la subjectivité angoissée de son héroïne. L’action déconstruite cède ainsi place à une sarabande de gestes, de regards, de bruits, de respirations, embrassant la condition des femmes paysannes à la façon d’une toile cubiste, où les réalités factuelles et psychiques sont présentées sur un même plan.





LA POÉSIE, LA MAISON, LE MONDE, ET LE CINÉMA les films de Mani Kaul et Govindan Aravindan

La restauration récente des films de Govindan Aravindan et Mani Kaul et leur sortie en France ont permis à ce que ces films nous tombent dessus. Govindan Aravindan et Mani Kaul sont indiens. Ils ont participé dans le début des années 70 à ce qu’on a appelé “le cinéma parallèle”, forme de “nouvelle vague” indienne, particulièrement riche et complexe. Sur le contexte, on n’en sait pas tellement plus. Car on s’est finalement suffi à ce qu’il y a à l’écran. Leurs films sont modestes, du point de vue des moyens mobilisés, du décor, de l’intrigue. Mais dans ce cadre minimal, c’est comme si le monde, les millénaires pouvaient s’y engouffrer. Dans Thampu de Govindan Aravindan, la seule décision de suivre une troupe de circassiens du Kerala est prétexte à embrasser plus large: les spectateur.ice.s, les enfants, un musicien, la rivière, les arbres, les animaux, la nuit, le jour, le temps qui passe. Dans Un jour avant la saison des pluies de Mani Kaul, le décor se résume à l’intérieur d’une seule maison: lieu rendu illimité et inépuisable par la mise en scène, source de tous les récits et de tous les imaginaires. Les quatre films de ce programme prennent la forme de contes et nous, devant cela, éprouvons simplement cette joie infantile de se laisser bercer par des histoires.

J’ai dit : « Ton visage est comme un paysage, l’arbre aussi. » Mais elle a cru que j’essayais de l’abaisser au niveau d’un arbre. J’ai dit qu’au contraire, j’essayais de regarder l’arbre comme je la regardais, elle. Alors, elle a été contente. Vous verrez, je pense, que c’est ainsi que ça se passe dans mes films. Mani Kaul