À PEINE OMBRE de Nazim Djemaï

dim. 16 avril 2023 19h00
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À QUELLE HEURE PASSE LE TRAIN? RENCONTRES CINÉMA(S) ET PSYCHIATRIE(S) |
CINÉMA(S) ET PSYCHIATRIE(S) # 2: FENÊTRE SUR LA BORDE
dim. 16 avril 2023, En présence de Geneviève Carles qui a travaillé à la Borde et pour le film de Nazim, séance suivi d'un repas
À QUELLE HEURE PASSE LE TRAIN?
RENCONTRES CINÉMA(S) ET PSYCHIATRIE(S)
CHAPITRE 2: FENÊTRE SUR LA BORDE
Les mots de Geneviève Carles:
Connaissant la clinique de Laborde professionnellement et personnellement depuis de nombreuses années, à la retraite j’ai décidé d’y travailler comme bénévole. Plus particulièrement au secrétariat du club lieu ‘stratégique’ de passages des Labordiens riche de rencontres. C’est comme ça que j’ai rencontré Nazim Djemai réalisateur du film A Peine Ombre et de deux autres films d’ailleurs ‘Nawna’ je ne sais pas en 2007 et La Parade de Taos en 2010
Nous avions réalisés avant le tournage d’A Peine ombre cinq films d’un quart d’heure sur les ateliers qui avaient lieu à la clinique ou à l’extérieur Il m’a ensuite proposé de l’aider à faire le film, néophyte j’ai hésité pas très longtemps…Il m’a fait confiance, nous nous faisions confiance mutuellement. J’ai donc fait la prise de son et participé activement au montage. Les pensionnaires que nous connaissions nous ont aussi fait confiance.
Nous avons filmés pendant 9 mois avec l’accord du docteur Oury fondateur de la clinique décédé en 2014. Il a filmé avec sa caméra et sans budget, juste la nécessité de faire ce film pour nous deux de nos places singulières. Il m’a offert une aventure humaine extraordinaire, j’ai appris beaucoup, la richesse de son regard de cinéaste, subtil, poétique sans concessions au plus près des êtres dévoilant une humanité non feinte dont je suis encore émue aujourd’hui.
À PEINE OMBRE, Nazim Djemaï, France, 2012, 86’
Qu’est-que c’est que ce monde de fous ? Ce film montre l’institution particulière qu’est la Clinique psychiatrique de La Borde, berceau de la psychothérapie institutionnelle fondé par le Docteur Oury en 1953. Le château est le lieu central où tout a commencé et où le Docteur Oury a installé ses premiers patients. Aujourd’hui il y a quatre secteurs d’hospitalisation qui accueillent cent sept personnes et trente en hôpital de jour. Bien que le prix de la journée d’hospitalisation soit inférieur à celui des établissements de même type, cette institution, par sa singularité, reste fragile.
Le film sera constitué d’un chapelet d’entretiens où chacun décide du lieu où il souhaiterait être filmé, choix parfois insolite du personnage. C’est grâce à cette proposition que nous appréhenderons la topographie du paysage labordien et ce sur une étendue de 40 hectares de bois et d’étangs, où chacun circule librement dans ses différents espaces. La Borde et ses entours, les écuries, le poulailler, le jardin potager, la serre etc. sont rythmés par le défilement des saisons.
L’hiver, les traces de boue dans l’entrée des secteurs signent les allées et venues incessantes des pensionnaires.
En été, les journées sont étales, les pensionnaires peuvent profiter du parc, se prélasser tout en discutant par petits groupes dans l’herbe jusque tard dans la soirée. La clémence du temps incite les pensionnaires à prendre leur repas sur les tables disposées autour du château. Les bancs éparpillés sont les témoins silencieux des conversations aux détours de rencontres fortuites. Cependant cette apparente douceur qui semble apaiser les corps et les esprits se dérobe devant les hautes solitudes de la maladie.
Nazim Djemaï
« J’estime que n’importe qui peut prendre une caméra et faire un film. À condition d’être mû par quelque chose, par un désir de trouver l’émotion. Les images sont faites pour que le spectateur puisse les ressentir. Il doit se réapproprier tout cela. Et moi, je ne peux lui donner une piste car cela ne lui permettra pas d’avancer et de répondre à ses propres questions. Il faut lui donner du temps pour s’installer dans un plan. Il ne peut que s’accrocher à lui-même ».
À QUELLE HEURE PASSE LE TRAIN? RENCONTRES CINÉMA(S) ET PSYCHIATRIE(S)
« Il s’agissait avant tout d’être solidaire de gamins afin qu’ils échappent au sort que la société leur réservait ». C’est ainsi que Jacques Lin caractérise l’expérience de la prise en charge d’enfants autistes, jugés irrécupérables, menée à partir de 1968 dans une ferme située dans les Cévennes avec Fernand Deligny et d’autres « présences proches ». Cette solidarité dont parle Jacques Lin, s’est tissée à partir de différentes activités conduites collectivement: cuisine, élevage, maraîchage, promenades, dessins. Et au milieu de ces gestes coutumiers, le cinéma s’est parfois trouvé une place. C’est à travers les films qui découlent de cette tentative – Le moindre geste, Projet N – que l’on s’est rendu compte que psychiatrie et cinéma avaient probablement à faire ensemble. Cela nous a donné le désir de chercher. Non pas des films sur la folie, ou sur les fous (Hollywood ou Netflic encore, excellent dans le domaine), mais où le cinéma (voir et entendre) est le lieu d’un travail en commun et un point de rencontres possibles. Dès lors, on tâchera d’ouvrir quelques fenêtres chaque mois au sujet de ces questions. Avec aussi l’envie que ces séances s’enrichissent d’interventions, de discussions et de débats.
Tom & Nathan