Tribute to Derek Jarman

Voix singulière et immensément libre de la contre culture des années 1970 – 1990, résolument critique de la très normative société britannique, et centrale dans le champ du cinéma queer et gay de l’époque.

En traversant le parcours de Derek Jarman (1942 – 1994) on découvre un cinéaste qui ne cesse d’expérimenter des formes, de se salir les mains et faire un cinéma brut, dans l’économie des moyens, souvent en vidéo, 16mm ou Super 8. Son oeuvre prolifique, encore assez peu connue dans son ensemble, compte une douzaine de longs métrages et une quarantaine de courts, de vidéoclips, ainsi que de livres de poésie, des essais et des tableaux.

Ce programme s’articule autour de quatre de ses premiers films en copie numérique récemment restaurés: Sebastiane, Jubilee, La Tempête et The Last of England. Avec Sebastiane, on découvre le Jarman militant homosexuel, qui engage dans son cinéma une déconstruction du corps masculin, des identités de genre et leur représentation au sein de la société.

Très à l’écoute du climat social et politique, Derek Jarman poursuit son oeuvre avec deux films dépeignant une société britannique. Diamétralement opposés dans leur forme: Jubilee est un film d’anticipation résolument punk, et La Tempête constitue une minutieuse adaptation de William Shakespeare. The Last of England, oeuvre charnière qu’il réalise peu après avoir découvert sa séropositivité, est une réaction ouvertement critique à la politique thatchérienne et à l’état du monde.

Son cinéma a rassemblé autour de lui de grand·e·s artistes contemporain·e·s comme l’actrice Tilda Swinton,le compositeur Brian Eno, et de nombreux·ses musicien·ne·s punk et rock comme Adam and the Ants et Siouxsie Sioux and the Banshees. Son oeuvre est souvent associée pour des raisons évidentes à Kenneth Anger et Pier Paolo Pasolini mais aussi à Carmelo Bene ou Jack Smith pour leur mysticisme et la fascination commune pour les grands personnages de l’histoire artistique et politique.

Didier Roth Bettoni, auteur notamment de l’ouvrage Sebastiane ou saint Jarman, cinéaste queer et martyr précise: « Plus que tout autre cinéaste de l’époque, Derek Jarman se situe à un carrefour entre un cinéma underground mettant l’accent sur les recherches formelles, un cinéma identitaire aux tonalités d’abord politiques et un cinéma de l’intime et de la construction de soi. »




SEBASTIANE

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Au IVe siècle après J.-C. le magnifique Sebastiane est membre de la garde personnelle de l’Empereur Dioclétien. Quand il tente d’intervenir pour arrêter une exécution, Sebastiane est dégradé, puis exilé dans une garnison éloignée. Dans ce lieu désertique les soldats romains s’adonnent régulièrement à des relations sexuelles. Sebastiane, seul chrétien de la garnison, reste à l’écart mais sa beauté sculpturale et son insoumission troublent Severus, chef de la garnison.

JUBILEE

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Ce film d’anticipation résolument punk suit les dérives de la reine Elisabeth 1ère, envoyée par un occultiste dans l’Angleterre sauvage des années septante. Elle débarque dans une ville en pleine décadence sociale et matérielle et découvre que la reine Elisabeth II a été assassinée et le palais de Buckingham est devenu un studio d’enregistrement. Elle suit et observe les agissements d’une bande de nihilistes incarnée par diverses icônes de la scène punk, post-punk et gothique.

LA TEMPÊTE

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Le mage Prospero, anciennement duc de Milan déchu par son frère, vit sur une île déserte avec sa fille Miranda. Il contrôle les éléments naturels et les esprits Ariel et Caliban avec qui il parvient à provoquer le naufrage d’un navire portant son frère, ainsi que le roi de Naples et son fils. Sur l’île, il leur fait subir diverses épreuves à caractère initiatique dans le but de les punir de leur traîtrise, mais cette querelle se termine sur une réconciliation et la libération des deux esprits.

THE LAST OF ENGLAND

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The Last of England est un film essai dépeignant le déclin et la fin de l’Angleterre ravagée et détruite par des violences politiques et sociales. L’atmosphère post-apocalyptique du film est parsemée par des images marquantes : un garçon qui se masturbe sur un tableau du Caravage, des personnages errants qui se piquent, des exécutions, un bébé entouré de titres de journaux belliqueux, etc. Le film dénonce la médiocrité de la société et de l’Angleterre ultra-libérale de Thatcher dans un essai ultra personnel qui se situe dans un futur dystopique proche.