LA POÉSIE, LA MAISON, LE MONDE, ET LE CINÉMA les films de Mani Kaul et Govindan Aravindan

La restauration récente des films de Govindan Aravindan et Mani Kaul et leur sortie en France ont permis à ce que ces films nous tombent dessus. Govindan Aravindan et Mani Kaul sont indiens. Ils ont participé dans le début des années 70 à ce qu’on a appelé “le cinéma parallèle”, forme de “nouvelle vague” indienne, particulièrement riche et complexe. Sur le contexte, on n’en sait pas tellement plus. Car on s’est finalement suffi à ce qu’il y a à l’écran. Leurs films sont modestes, du point de vue des moyens mobilisés, du décor, de l’intrigue. Mais dans ce cadre minimal, c’est comme si le monde, les millénaires pouvaient s’y engouffrer. Dans Thampu de Govindan Aravindan, la seule décision de suivre une troupe de circassiens du Kerala est prétexte à embrasser plus large: les spectateur.ice.s, les enfants, un musicien, la rivière, les arbres, les animaux, la nuit, le jour, le temps qui passe. Dans Un jour avant la saison des pluies de Mani Kaul, le décor se résume à l’intérieur d’une seule maison: lieu rendu illimité et inépuisable par la mise en scène, source de tous les récits et de tous les imaginaires. Les quatre films de ce programme prennent la forme de contes et nous, devant cela, éprouvons simplement cette joie infantile de se laisser bercer par des histoires.

J’ai dit : « Ton visage est comme un paysage, l’arbre aussi. » Mais elle a cru que j’essayais de l’abaisser au niveau d’un arbre. J’ai dit qu’au contraire, j’essayais de regarder l’arbre comme je la regardais, elle. Alors, elle a été contente. Vous verrez, je pense, que c’est ainsi que ça se passe dans mes films. Mani Kaul




THAMPU de Govindan Aravindan

LA POÉSIE, LA MAISON, LE MONDE, ET LE CINÉMA les films de Mani Kaul et Govindan Aravindan


Une troupe de cirque arrive dans un petit village côtier du Kerala et au troisième jour reprend sa route. À l’arrivée du convoi, l’imperturbable ondulation des vagues cède du terrain à l’excitation des écoliers qui voit un humble chapiteau se dresser sur un monde de cerceaux, de cordes, d’acrobates, de musiciens et d’animaux. La caméra observe cette suite d’événements sans drame, épisodes banals qui se chargent d’un ineffable magnétisme. Un plan après l’autre, nous avons le sentiment inouï de voir naître et s’épuiser dans la même temporalité la réalité et le secret de chaque geste. Thampu est une sensation : celle de voir « à plans feutrés » un film devenir une allégorie du cinéma.

USKI ROTI de Mani Kaul

LA POÉSIE, LA MAISON, LE MONDE, ET LE CINÉMA les films de Mani Kaul et Govindan Aravindan


Dans Uski Roti, une jeune épouse traverse chaque jour les sentiers de campagne du Pendjab pour attendre son mari, chauffeur, à l’arrêt de bus et lui donner le pain qu’elle a patiemment pétri à cet effet. Mais l’homme la néglige, préférant boire, jouer aux cartes et entretenir une maîtresse que rentrer au bercail. L’expectative est donc l’objet de ce film à l’empreinte documentaire, imprégné du quotidien villageois, mais au déroulement inédit, car arrimé à la subjectivité angoissée de son héroïne. L’action déconstruite cède ainsi place à une sarabande de gestes, de regards, de bruits, de respirations, embrassant la condition des femmes paysannes à la façon d’une toile cubiste, où les réalités factuelles et psychiques sont présentées sur un même plan.

ASHAD KA EK DIN de Mani Kaul

LA POÉSIE, LA MAISON, LE MONDE, ET LE CINÉMA les films de Mani Kaul et Govindan Aravindan


Élève de Ghatak, en rupture avec les conventions, Mani Kaul invente un cinéma formaliste dont la radicalité accomplit de surprenantes opérations. C’est bien le cas dans ce 2e film du cinéaste, qui conte l’amour de Mallika et du poète Kalidasa, appelé à la cour. Toute l’action se tient dans l’habitation de Mallika avant et après le départ de Kalidasa, simple cahute où s’enracinent la solitude de la jeune femme et la nostalgie de l’écrivain, qui a trouvé sa vocation dans ce pays de montagnes. Visages et parole, désynchronisés, racontent le vif des sentiments tandis que le monde pulse à travers les paysages, la pellicule parfois brûlée par le soleil, la suggestion sonore – surprenantes inflexions balayant un apparent hiératisme.

DUVIDAH de Mani Kaul

LA POÉSIE, LA MAISON, LE MONDE, ET LE CINÉMA les films de Mani Kaul et Govindan Aravindan


Inspiré d’un conte populaire du Rajasthan, Duvidha est l’histoire du fils d’un marchand qui revient chez lui avec sa nouvelle épouse, avant d’être renvoyé s’occuper du commerce familial. Un fantôme tombe amoureux de la jeune femme, prenant l’apparence de son mari absent, et vit avec elle. Celle-ci met au monde un enfant.

OUVERTURE D’UN BEAU BEAU CYCLE <3

LA POÉSIE, LA MAISON, LE MONDE, ET LE CINÉMA les films de Mani Kaul et Govindan Aravindan


LA POÉSIE, LA MAISON, LE MONDE, ET LE CINÉMA les films de Mani Kaul et Govindan Aravindan ON NE PEUT MALHEUREUSEMENT PAS VOUS DIRE CE QU’IL Y AURA CE SOIR LÀ, QUELQUE CHOSE DE BEAU ASSURÉMENT ET ACCOMPAGNÉ D’UN BON REPAS