Spoutnik est un cinéma historique né en 1986 dont l’engagement est resté fidèle à sa ligne de résistance.
Cinéma satellite au sein de l’Usine, cinéma tournant en orbite à l’intérieur de Genève, cinéma gravitant autour d’œuvres hors-système, d’astres invisibles ou de planètes mal connues, Spoutnik est un appareil qui permet de créer des microcosmes en dehors de la rentabilité-machine-industrie du cinéma commercial. C’est un espace dédié aux films — mais pas que — qui expérimentent, cherchent, et s’interrogent, à la marge.
Avec l’appui de l’Etat et de la Ville de Genève, du Fond Culturel Sud, du Département des affaires culturelles et de la Loterie Romande.
Concerning Violence Göran Hugo Olsson et Sophie Vukovic avec voix Lauryn Hill
USA, Suède, Danemark
· 2013 ·
89'
| VOstFR
VEN 14.11 - 20:30
DIM 23.11 - 19:00
C’est à une réflexion sur la violence comme outil de
résistance et de libération que nous invite le documentaire du
réalisateur suédois Göran Hugo Olsson. Concerning Violence se veut un hommage et une illustration des Damnés de la terre, le dernier ouvrage de Frantz Fanon, publié l’année de sa mort en 1961.
Le
film s’ouvre avec une préface éclairée et engagée de Gayatri
Chakravorty Spivak, professeure à Colombia et connue pour ses travaux
sur les « subalternes »1,
qui rappelle la trajectoire de Frantz Fanon. Né en 1925 en Martinique,
il grandit dans une famille bourgeoise et se rend en métropole lorsqu’il
s’engage dans les forces gaullistes, puis, après 1945, pour suivre ses
études de médecine. Il réalise que ses privilèges de classe ne valent
rien aux yeux des Blancs. Il va se servir de son expérience vécue pour
analyser la colonisation dans le monde, mais surtout en Algérie, où il
exerce comme psychiatre et s’engage dans la lutte pour l’indépendance.
Pour Spivak, il ne s’est pas contenté de vouloir comprendre la
colonisation, mais il a tenté d’agir par rapport à elle, ce qu’il a fait
grâce à la psychiatrie, en soignant ceux qui ont souffert de la
violence.
Le film se concentre sur les réflexions de Fanon sur la violence, qu’il mène dans la première partie des Damnés de la terre et
dans lesquelles Jean-Paul Sartre, rédacteur de la préface à la première
édition, a surtout vu une apologie de la violence. Or, comme Spivak le
rappelle, Fanon considère la violence comme le dernier recours des
colonisés, « parce qu’il n’y a pas d’autre réponse possible à une
absence absolue de réponse et à un exercice absolu de la violence érigée
en loi de la part des colons ». La leçon de Fanon est qu’il faut
utiliser les armes des colons contre eux : selon lui, le colonialisme
est « la violence à l’état de nature et ne peut s’incliner que devant
une plus grande violence »2. Dans cette optique, la violence du colonisé est pensée comme inévitable, et elle se justifie parce qu’elle est seconde.