Ukraine sous pression

À l’occasion de la sortie de “Donbass” de Sergei Loznitsa, le Cinéma Spoutnik propose de mettre en lumière certains aspects des conflits qui font rage en Ukraine depuis les événements de Maïdan et la destitution du président pro-russe Viktor Ianoukovytch. Le parti pris de Sergei Loznitsa est clair dans sa satire dramatique très stéréotypée d’un Donbass primitif qui se range du côté du grand frère Russe sans vouloir l’admettre ouvertement. Ce qu’il faut comprendre avant tout, c’est que la région du Donbass fut longtemps le grenier principal et le coeur industriel de l’URSS, Lénine disait d’ailleurs “Le Donbass est le vrai fondement de notre économie”. Les enjeux sont évidents, tant pour l’Europe que pour la Russie, la manipulation de l’information fait rage dans les deux camps.

Au centre de ce conflit politique avant tout, certaines populations ne se rangent pas forcément sous cette binarité d’opinions. Tant à Kiev qu’à Kharkiv, des groupes de personnes s’organisent pour vivre autrement. Leurs luttes, dont l’importance n’est pas moindre, concernent la liberté d’expression et de développement hors des logiques dominantes oppressantes qui sont universellement subies. La contre-culture ukrainienne vit et survit à travers les arts de la rue, la danse, le théâtre, le cinéma, l’écriture ou le dessin. Elle se bat contre la précarité de pensée ou les difficultés matérielles. Les centres autogérés fleurissent et disparaissent, les théories politiques sont taclées par les institutions étatiques, les personnes LGBTQIA subissent une discrimination violente qui se traduit par de l’agression verbale et corporelle.

Ce programme propose plusieurs films présentés par plusieurs personnes de cette contre culture ukrainienne qui mettront en lumière ces complexités dans un climat particulièrement compliqué.




Oleksiy Radynski du Visual Culture Research Center de Kiev, co-curateur du programme « Ukraine sous pression » sera présent au Spoutnik du lundi 22 au mercredi 24 octobre 2018


Ce programme a été construit en collaboration avec Oleksiy Radynski du Visual Culture Research Center à Kiev, initiative indépendante et associative pour la promotion de l’art et de la théorie politique. Réalisateur et écrivain, il a aussi participé en tant qu’éditeur de la version ukrainienne de “Political Critique” – plateforme d’information spécialisée dans les pays d’Europe de l’est.

Lundi 22: Ukraine sous pression – trois courts métrages en présence de Anatoly (Tolik) Belov, Oleksiy Radynski et Lyuba Knorozok

Mercredi 24: Discussion avant Donbass de Sergei Loznitsa qui sera précédé du court métrage “People Who Came to Power” de Oleksiy Radynski et Tomáš Rafa

Donbass

Ukraine sous pression


Dans le Donbass, région de l’est de l’Ukraine, un conflit hybride mêle interventions armées ouvertes et guerre de l’information. Les milices séparatistes pour la république indépendante du Donbass imposent leurs présences via des check points routiers fréquents et le soutien forcé de la population. Le film présente à travers ses plans séquences une balade dans les villes et les campagnes, comme un périple difficile empli de situations absurdes et satiriques. Toute la complexité du conflit qui oppose tant les politiques que les populations est présentée comme un noeud inextricable et qui pose la question de la réalité présentée dans les médias.

Varta1, Lviv, Ukraine

Ukraine sous pression


Ce film atypique se situe dans la ville de Lviv, dans l’ouest de l’Ukraine, documentant les quelques jours suivant la chute du régime Yanukovych en 2014. Des activistes pro-Maidan se parlent dans une radio improvisée et autogérée tout en reprenant le rôle et les fonctions de contrôle de la police qui a cessé d’opérer. Les voix de ces personnes, qui craignent le chaos ou l’arrivée de militants pro-russes, se mélangent avec les images crues de banlieues de la ville, posant la question de la construction de la mémoire collective.

Ukraine contre-culture

Ukraine sous pression


Ce programme a été construit en collaboration avec Oleksiy Radynski du Visual Culture Research Center à Kiev, initiative indépendante et associative pour la promotion de l’art et de la théorie politique. Réalisateur et écrivain, il a aussi participé en tant qu’éditeur de la version ukrainienne de “Political Critique” – plateforme d’information spécialisée dans les pays d’Europe de l’est.

Ces trois films proposent de mettre en regard des initiatives de plusieurs personnes actrice de la contre culture dans deux villes différentes d’Ukraine, à savoir Kiev et Kharkiv, avec un court métrage final de Anatoly (Tolik) Belov – artiste phare de la scène LGBTQIA underground ukrainienne.

My Father is my Mother’s Brother

Ukraine sous pression


Tolik, artiste de la scène underground ukrainienne, élève sa nièce Katya, petite fille têtue qui a pris l’habitude de l’appeler papa. Sa mère, Anya, est à la fois au cœur du film et comme vouée à la marge, dérivant entre solitude et séjours en hôpital psychiatrique. Des scènes de la vie quotidienne et domestique aux séquences de performance scénique, le film semble flotter, comme un air d’une chanson de Tolik, comme le regard perdu d’Anya, tandis que la lumière blanche et douce créée par Vadym Ilkov – à qui l’on doit en tant que chef opérateur Mariupolis (VdR, 2016) – baigne la vie du trio d’une beauté qui adoucit les tensions. Avec ce premier long métrage documentaire, il réalise un bouleversant portrait de famille, simple et délicat, révélant les liens qui unissent et les failles qui séparent. Attentif aux moments de creux, de silence, de solitude, mais aussi aux gestes de création – les jeux de Katya, les dessins, les tableaux, les chansons de Tolik – le film va chercher du côté du récit d’apprentissage aussi bien que du portrait d’artiste, et capte la fragile beauté d’une relation père-fille dans ce qu’elle a d’universel.